Tanger – La Commission de l’Union africaine (UA) plaide pour une mise en synergie de toutes les initiatives en cours liées à l’économie bleue, en vue d’une dynamique concertée qui harmonise la production alimentaire et la création d’emplois sur le continent, a souligné, mardi à Tanger, l’Ambassadeur, Josefa Leonel Correia Sacko, Commissaire à l’agriculture, au développement rural, à l’économie bleue et à l’environnement durable de la Commission.
S’exprimant à l’ouverture de la 3ème édition de la Conférence ministérielle de haut niveau sur l’Initiative de la Ceinture Bleue “Blue Belt Initiative – BBI”, Mme Sacko a affirmé que la Banque mondiale et la Banque africaine de développement, ainsi que les autres institutions financières et les partenaires de l’Afrique, sont appelés à se saisir des diverses et nombreuses opportunités d’investissement qu’offre le continent, aussi bien pour la mise en place d’infrastructures structurantes que pour l’accompagnement du secteur privé, y compris les petits producteurs.
La responsable africaine a, à cet égard, assuré que l’Initiative de la Ceinture Bleue, portée par le Royaume du Maroc et soutenue par la Banque mondiale, souligne au niveau supranational l’ambition d’une gestion durable et concertée du patrimoine aquatique du continent africain, faisant savoir que l’UA prend naturellement part à cette rencontre de très haut niveau, qui vise à consolider sa vision et son action, étant consciente des effets multiplicateurs que procure cette dynamique continentale.
Elle a noté que “l’Agenda 2063, le Plan de développement de notre espace commun, reconnaît le rôle des mers et des océans en tant que catalyseur de la transformation économique”, précisant que ce rôle est décliné dans son Objectif 1.6 intitulé “Économie bleue et océan pour une croissance économique accélérée”.
Cette reconnaissance, a-t-elle poursuivi, repose sur la richesse de nos océans, mers, rivières et lacs, qui regorgent de biodiversité et détiennent des réserves de pétrole, de gaz et de bien d’autres minerais, soulignant que la santé des océans est essentielle à la stabilité climatique mondiale, à la conservation de la biodiversité, à la sécurité alimentaire, aux moyens de subsistance et à l’avenir du genre humain.
“C’est la raison pour laquelle l’Afrique doit être déterminée et organisée en un front uni pour relever ces défis”, a-t-elle lancé, ajoutant: “ceci passe notamment par la coopération et la collaboration régionale, tout en recherchant et en plaidant pour des solutions équitables et durables, qui tiennent compte des besoins et des aspirations de développement”.
Evoquant la thématique de cette édition, Mme Sacko a fait savoir que l’économie bleue en Afrique génère en moyenne, de nos jours, plus de 296 milliards de dollars US et 49 millions d’emplois, relevant que, selon les projections, ces chiffres seront respectivement de 405 milliards de dollars US et de 57 millions d’emplois d’ici 2030.
“Pour la Commission, l’Initiative de la Ceinture Bleue, ainsi que celles en cours par ailleurs sur le continent, doivent, au regard de leurs spécificités respectives, fusionner en une démarche synergique et cohérente”, a-t-elle insisté, précisant qu’il s’agit, parmi tant d’autres, de la Grande Muraille Bleue, approche phare, transformatrice et collective encourageant la résilience et visant l’atténuation et l’adaptation aux effets du changement climatique.
Il s’agit aussi de la Déclaration de Moroni qui reconnait particulièrement les spécificités des États insulaires et la nécessité de leur intégration dans les politiques, stratégies et cadres continentaux et régionaux, a-t-elle enchainé.
La responsable africaine a assuré que la Ceinture Bleue doit servir à resserrer la coopération et la collaboration sur des thématiques comme la pêche, l’aquaculture marine, le tourisme côtier, le transport maritime et le commerce, tandis que la Muraille Bleue devrait constituer le rempart, la barrière par laquelle passe et sont filtrés les échanges économiques de l’Afrique avec le reste du monde.
La Muraille Bleue, a-t-elle enchainé, doit par ailleurs constituer le point de déploiement de nos stratégies continentales vis-à-vis des questions globales relatives aux changements climatiques, à l’acidification des océans et à la préservation des écosystèmes marins, soulignant que la mise en oeuvre par les Etats africains du traité sur l’exploitation des ressources marines au-delà des juridictions nationales (BBNJ) et la négociation des accords de pêche sont également deux sujets de l’heure à considérer dans le cadre de cette Initiative.
Mme Sacko a, par ailleurs, relevé que la Zone de Libre-échange continentale africaine (ZLECAf), principal instrument pour le développement de chaînes de valeur régionales durables et intégrées, constitue le cadre de collaboration au sein duquel les processus inclusifs de déploiement de l’économie bleue doivent être actionnés pour favoriser le développement des PME, l’innovation et l’esprit d’entreprise.
“Il est important que ces processus se focalisent sur les femmes, les jeunes, les communautés côtières et les autres groupes vulnérables. Cela requiert bien évidemment un dialogue coordonné entre les États et les régions, ainsi que la promotion d’approches circulaires de l’économie en tant que leviers pour l’intégration économique”, a-t-elle expliqué.
Selon la responsable, le renforcement, la consolidation et l’élargissement de l’architecture de sécurité maritime, en tant que dispositif clé pour le développement de l’économie et le déploiement de la ZLECAf, sont une nécessité impérieuse pour la prévention, la réduction et la coordination des interventions liées aux risques et crimes en mer, que cela soit vis-à-vis des travailleurs en mer, des écosystèmes marins et côtiers ou de la pollution plastique.
Elle a, dans ce sens, estimé que les fondements nécessaires pour accroitre les performances du Continent, en matière de production alimentaire et de création d’emplois liés au secteur de l’économie bleue, requièrent la mise en oeuvre de programmes qui permettent de cartographier les secteurs d’emplois traditionnels et émergents en économie bleue, identifier les besoins en recherche et infrastructures structurantes, donner une valeur marchande aux niches de développement des systèmes de production alimentaire bleue, déterminer les demandes des marchés nationaux et à l’export en produits alimentaires et emplois bleus, et de renforcer les cadres et instruments juridiques nécessaires aux échanges commerciaux avec l’extérieur et à l’investissement dans les chaines de valeur bleues et au développement des PME.
La responsable a, à ce titre, formulé le souhait que les actions convenues à Tanger permettront de développer et de gérer durablement les ressources bleues du Continent et de poursuivre ainsi le processus de développement engagé pour une économie bleue de l’Afrique, qui soit prospère et au service des économies et des peuples africains.
Cette Conférence ministérielle, organisée par le ministère de l’Agriculture, de la pêche maritime, du développement rural et des eaux et forêts, en partenariat avec la Banque mondiale, sous le thème “Construire une base pour stimuler l’alimentation et les emplois dans le cadre d’une approche de développement de l’économie bleue”, se tient avec la participation de représentants de 32 pays, dont 16 délégations conduites par des ministres.
Elle s’inscrit dans le cadre de la 1ère édition de la Semaine africaine des océans, qui englobe une série de rencontres et d’échanges des ministres en charge de la pêche et de l’économie bleue et de hauts responsables sur les enjeux et les défis de la croissance économique que jouent les océans dans le continent africain.